mardi 15 octobre 2013

LES COMMUNAUTÉS ECCLÉSIALES DE BASE DANS L’ÉGLISE CATHOLIQUE

La CEB (Communauté Ecclésiale de Base) ou CCB (Communauté Chrétienne de Base) ou CEV (Communauté Ecclésiale Vivante) ou CEVB (Communauté Ecclésiale Vivante de Base), est une communauté regroupant le peuple de Dieu (fidèles laïcs, catéchumènes, prêtres, religieux et religieuses d’un village, d’un quartier, d’un secteur ou sous-secteur donné). Il peut également exister des CEB par affinité professionnelle (CEB d’avocats, de médecins etc.).

La CEB se confie à un Saint Patron dont elle porte le nom et tente d’en imiter les vertus.

Nées en Amérique latine, plus précisément au Brésil, les Communautés Ecclésiales de Base (CEB), qui n’étaient en 1968 qu’une expérience balbutiante, se sont multipliées en Amérique latine et dans le monde. Les communautés de base latino-américaines sont nées de mouvements sociaux et démocratiques, en milieu rural ou urbain : soutien des paysans sans terre, création de coopératives agricoles ou alimentaires, de centres de soin, de centres d’accueil et de formation pour les enfants des rues et les femmes victimes de violences, entraide communautaire pour construire des logements, favoriser l’accès à l’eau et à l’électricité, etc. Ce n’est qu’après s’être organisées de la sorte qu’elles ont été prises en charge par l’Eglise Latine. Regroupant des militants catholiques, elles ont d’abord consolidé la société civile et la démocratie. Elles s’inspiraient de l’expérience des toutes premières communautés chrétiennes, où célébrations et attitudes de vie se rejoignaient dans un témoignage communautaire.

Mais si tout le monde a entendu parler de l’expérience latino-américaine, force est de constater que les CEB africaines sont beaucoup moins connues, alors qu’au cours de la décennie 1970-1980, la très grande majorité des Conférences Episcopales d’Afrique a opté pour une pastorale des Communautés Ecclésiales de Base.

En conclusion, on peut noter qu’en Amérique latine l’initiative étant venue des laïcs, l’Église institutionnelle n’avait fait, finalement, que légitimer un système déjà existant, à l’inverse de l’Afrique où les CEB ont été imposées par la hiérarchie ecclésiale.

Lors du Synode des Évêques pour l’Afrique en 1994, les CEB sont apparues comme un magnifique ferment de communauté pour renforcer l’Église famille de Dieu en Afrique. Il est en effet évident depuis Vatican II que le renouveau pastoral doit s’effectuer à partir du renouveau de la vie communautaire. Les CEB peuvent ainsi répondre au problème fondamental du décalage entre l’institution ecclésiastique et la vie du peuple qui a souvent pour conséquence que la vie des baptisés est trop peu cohérente avec leur foi.

Mais ce n’est pas par souci d’accorder plus de poids aux laïcs que l’ensemble des Églises africaines, a opté pour une pastorale des communautés de base, mais bien plutôt parce que l’adoption d’une telle pastorale s’est révélée nécessaire pour la survie même de l’Église catholique sur le continent, une Église longtemps coupée de sa base. Confier à la communauté la responsabilité de sa foi permet donc à l’Église d’entretenir une religiosité et des pratiques chrétiennes fortes avec peu de prêtres.

L’adoption d’une pastorale des CEB permet à l’Eglise d’entrer dans la concurrence communautaire vis-à-vis des autres religions. En effet, l’Église a longtemps suscité des conversions individuelles. Cependant, une telle stratégie contribuait à couper les catholiques de leur famille et des solidarités traditionnelles. Ainsi isolés, les nouveaux convertis demeuraient très fragiles et les échecs étaient nombreux.

Les CEB constituent une réaction contre ce choix pastoral du salut individuel. En insérant ainsi le catholique dans une communauté, l’Eglise est désormais plus à même de lutter contre l’extension de l’Islam, de certaines Eglises protestantes et contre le retour des pratiques animistes, religions qui ont toujours accordé une grande place à la dimension communautaire.

Dès le début des années 60, le catholicisme a été en butte aux critiques de nombreux théologiens africains. Ceux-ci lui reprochaient d’être resté une religion étrangère dans la mesure où son expression continuait à être fortement marquée par la culture occidentale. Les Eglises locales se sont donc appliquées à rechercher les moyens de leur «  africanisation ».

C’est en cela que le Pape Paul VI déclara, lors de son voyage à Kampala en Ouganda, en 1967 : « Il faut que l’Africain, en devenant chrétien, n’ait plus à se renier lui-même ». C’est la raison pour laquelle on a finalement accordé aux CEB le soin de rechercher elles-mêmes les expressions adaptées à leur foi car étant plus proches des problèmes, elles étaient les plus à même d’élaborer des éléments de réponse adéquats.

La crise des vocations montre qu’il est urgent de décentraliser la paroisse pour susciter et vivifier, sur le territoire de la paroisse, des communautés ecclésiales de base où les chrétiens se sentent davantage «partie intégrante» de l’Eglise. Ces communautés ecclésiales de base permettent de susciter un dynamisme spirituel et populaire qui peut se répandre comme une traînée de poudre.

Par ailleurs, les CEB sont aussi des lieux de promotion et de formation des laïcs. Elles permettent leur implication dans l’action pastorale de l’Eglise. Elles sont des acteurs de la vie ecclésiale, elles s’occupent de la pastorale, du catéchisme, de l’évangélisation et du service social, de l’œuvre caritative grâce à la participation active des membres qui ont d’étroits contacts avec la société. Elles sont par ailleurs d’un très grand soutien pour les évêques et les prêtres.

Enfin, les communautés ecclésiales de base accompagnent au quotidien les aspirants aux sacrements dans leurs démarches ainsi que leurs vies respectives.

Benoît XVI lors de la visite ad limina de l’épiscopat congolais en 2005 a déclaré : « Vous soulignez la nécessité de travailler à une évangélisation en profondeur des fidèles. Les Communautés Ecclésiales Vivantes, présentes en tout point de vos diocèses, reflètent bien cette évangélisation de proximité qui rend les fidèles toujours plus adultes dans leur foi, dans un esprit de fraternité évangélique selon lequel tous s’efforcent de penser ensemble les divers aspects de la vie ecclésiale, notamment la prière, l’évangélisation, l’attention aux plus pauvres et l’autofinancement des paroisses ».

Continuant dans la même ligne que le pape, Mgr Nicolas Djomo, évêque au Congo Kinshasa, affirma à sa suite : « nous devons arriver à consolider les CEB, en tant que noyau de la nouvelle évangélisation en profondeur ».

Au plan Socio-économique, les CEB peuvent créer des PME ou lever des fonds pour se donner les moyens de mener à bien des projets sociaux. Comme projets sociaux, elles peuvent mener des actions en aidant les pauvres, les étrangers, les veuf/s (ve/s), les orphelin(e)s, les sinistrés, les déplacés de guerre et les réfugiés. Elles peuvent aussi former des groupes de mères, de jeunes. Les CEB peuvent même créer au sein de leur secteur ou sous-secteur des garderies d’enfants, des dispensaires de santé, des écoles publiques, etc. Elles forment un réseau de fraternité et de solidarité qui sert de fondation aux projets socio-économiques. Exemples d’axes sociaux sur lesquels une CEB peut orienter son action : Le taux de chômage, le taux d’alphabétisation, la lutte contre la drogue chez les jeunes, la lutte contre la cybercriminalité chez les jeunes, etc.).

Pourtant beaucoup de CEB en Afrique déclarent ne pas avoir d'engagements dans le domaine socio-économique et sont donc loin d’avoir atteint leurs objectifs dans ce domaine.

Les CEB sont aussi un lieu de la réconciliation. En elles, des groupes en conflits trouvent l’opportunité de se rencontrer face à face et de découvrir qu’ils sont avant tout des frères, cherchant ce qui peut les unir. En elles, chacun est convaincu que le pardon est possible ; que la haine, la vengeance, le conflit ne sont pas une fin et qu’on peut toujours décider de s’acheminer vers la réconciliation fraternelle. Elles sont des communautés de fraternité universelle.

Les Communautés Ecclésiales de Base sont des communautés de foi, réunies au nom du Seigneur, dans l’esprit des Actes des Apôtres et ayant au cœur la Parole de Dieu. Leur façon de vivre la foi apparait éclairante dans la vie de tous les jours. La CEB est une communauté qui vit sa foi et éduque ses membres à la foi. Une foi qui se fait vie et témoignage de vie ! Quand par exemple une ethnie accueille dans sa maison d’autres ethnies, sans privilégier les conflits séparant les différentes fractions sociales et tribales, on se rend subitement compte de l’efficacité que la fraternité évangélique imprime dans les cœurs des hommes.

Les CEB sont aussi est des communautés d’espérance, c’est-à-dire des communautés qui veulent vivre et faire vivre au-delà des vicissitudes sociales. Elles lisent les signes des temps et agissent sur leur milieu avec la conviction de n’avoir aucune intention de céder au découragement. Dans les CEB les sinistrés de guerres par exemple trouvent des maisons et surtout des frères et des sœurs qui les accueillent et qui leur redonnent la joie de vivre.

Les CEB sont aussi des communautés de charité faisant des béatitudes leur leitmotiv.

Le bon fonctionnement des CEB est fruit d’une collaboration pluridimensionnelle : de l’évêque au tout dernier fidèle de la périphérie de la dernière paroisse. Cette collaboration de tous permet plus d’efficacité.

En plus de la grâce de l’Esprit-Saint, la compétence est de rigueur. C’est pourquoi il est très nécessaire que les catéchistes, ou mieux les animateurs des CEB, soient suffisamment formés pour porter de poids de leur vocation. Voilà pourquoi aux Évêques congolais Benoit XVI n’a pas hésité à dire ceci en 2005 toujours lors de sa visite ad limina de l’épiscopat congolais en 2005: « Dans cette perspective, je vous encourage à veiller avec une attention extrême à la qualité de la formation permanente des responsables de ces communautés, notamment les catéchistes dont je salue le dévouement et l’esprit ecclésial ».

Déjà au Diocèse de Tshumbe en République Démocratique du Congo en 1976, il avait été reporté « que les Catéchistes sont les piliers de nos jeunes Églises africaines. Les prêtres, même s’ils sont nombreux, sont dans l’impossibilité de proclamer de manière permanente la Parole de Dieu dans toutes les Communautés Ecclésiales. Pour enseigner le Catéchisme, pour entretenir d’une manière permanente la vie chrétienne dans les Communautés Ecclésiales et pour présider les assemblées dominicales à l’absence du prêtre, indispensables sont les Catéchistes ».

Á l’intérieur des Communautés Ecclésiales de Base, il existe plusieurs ministères, groupes et pastorales, qui ont tous leur propre leader élu dans des conseils représentatifs ou nommés par les agents pastoraux (Prêtres). La CEB s’appuie sur la pédagogie du «voir, juger, agir» développée par l’Action catholique.

En général, ces communautés devront être le fruit de l’initiative des agents pastoraux, mais certaines proviendront sans doute des membres d’une communauté où il n’y a ni chapelle ni prêtre. L'organisation globale de ces petites sociétés (commune ou quartier), doivent rapidement été prises en mains par leurs membres se substituant à l'administration ecclésiastique déficiente. On se partage les tâches, on élit des responsables aussi bien au niveau de la vie religieuse (catéchèse, liturgie) qu'au niveau de la vie civile (santé, éducation, loisirs, logement, etc.). La lecture et les commentaires de la Bible constituent la base de ce partage.

Elles devront être soutenues par leurs évêques qui devront favoriser la formation de communautés chrétiennes, comme de petites cellules de la grande paroisse souvent trop lointaine. Ces actions viseront à former des communautés où les chrétiens partagent la coresponsabilité de la vie et de la mission de l’Église. Il s’agit pour ces communautés alors de diriger les activités religieuses et d’organiser les visites du curé en préparant les Laïcs (enfants, jeunes et adultes) aux sacrements de Baptême, d’Eucharistie, de Confirmation et de Mariage.


En plus de jouer tous les rôles que nous venons de citer, la CEB idéale serait, selon le Vicariat Apostolique de Mongo[1] une communauté d’association d’environ 30 personnes sans ségrégation sur le sexe, l’âge, la culture, l’ethnie, etc. (de 20 à 100 membres selon le Blog des Paroissiens Progressistes[2] ; une cinquantaine de personnes selon d’autres sources).
Or, actuellement, elles rassemblent beaucoup plus de personnes, ce qui nuit à leur fonctionnement et réduit leur dimension communautaire.

Sources

*      Vicariat Apostolique de Mongo (http://eglisemongo.org/spip.php?article113)
*      Florence BOILLOT sur « Les Communautés Chrétiennes de Base au Burkina Faso »
*      Albert-Désiré NGELESE NANGAA dans « L’Église active dans l’histoire des hommes, Cas des communautés ecclésiales vivantes de base CEVB »
*      Bernadette CONFE, Présidente du Conseil National du Laïcat du Burkina dans « Les Communautés Ecclésiales Vivantes, Lieux d’approfondissement et de partage de la foi », Congrès panafricain des Laïcs Catholiques, YAOUNDE du 4-9 Septembre 2012.


[1] Né en décembre 2001, la Vicariat Apostolique de Mongo est une circonscription de l’Église Catholique qui couvre les régions largement islamisées du Nord et de l’Est du Tchad, sur 540.000 km², aux frontières de la Libye, du Soudan et de la République Centrafricaine.
[2] Voir sources

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